Portrait de Clémence - avec retouches et photos

J'ai exécuté ce portrait de Clémence (la grande soeur de Perrine et des jumeaux Léo et Lucas) à partir d'une photo que j'ai prise le 26 décembre dernier.

Le travail a été essentiellement technique et m'a posé nombre de problèmes. Pour ceux que cela intéresse, en voici quelques uns.

Le dessin d'abord : impossible pour moi de le faire à main levée, ce n'était guère ressemblant. J'ai choisi d'imprimer la photo en A4 et de prendre des mesures les plus précises possibles pour les reproduire sur papier aquarelle (38x58 cm avec les marges). Parfois, un petit écart d'un ou deux millimètres d'un élément suffisait à déformer grossièrement le visage. Par exemple l'écartement des yeux, très sensible. J'ai dessiné avec des crayons de couleur aquarellables, pratiques !

Certains éléments du visage sont plus complexes que je pensais : les yeux, l'espace entre le nez et la lèvre supérieure par exemple.

Le visage représente une "grande" surface à traiter de manière très progressive, en mouillé sur mouillé. Conserver le bon taux d'humidité fût un casse-tête (surtout quand il faut en même temps répondre au téléphone !).
Pire : il y a dans ce visage un mélange de lumières douces et crues. D'ombres très nuancées mariées avec des contrastes vif, comme sur la joue gauche, ou sur les lèvres. Donc du mouillé pour certaines transitions, du sec pour d'autres !

Pour les couleurs du visage, il fallait tenir compte à la fois du reflet rouge du chapeau et du reflet bleu du pull-over, le tout formant une transition très douce.

J'ai choisi de monter les couleurs du visage assez lentement, par de nombreux lavis successifs assez légers. Toutefois, certaines zones et ombres me semblaient pouvoir se traiter de manière plus directe (comme sous l'oeil droit). J'ai été trahi plusieurs fois par le rendu trop foncé de certaines couleurs. J'ai pu éclaircir légèrement certaines zones après coup, avec un pinceau brosse synthétique ... et des mouchoirs en papier pour absorber les pigments.

Et toujours cette difficulté avec les foncés.

J'ai travaillé en gros en trois séances : la première pour le dessin au crayon. La seconde pour l'exécution proprement dite, après quoi j'ai caché le dessin quelques jours. A la troisième séance, après cette "absence" de quelques jours, il m'a semblé que je repèrais plus facilement les défauts majeurs et que j'attachais moins d'importance à des détails.

Décidément, le portrait est une discipline difficile, mais qui donne envie de continuer.



Après publication du portrait sur ce blog, j'ai de nouveau caché l'aquarelle quelques temps : d'autres défauts me sont apparus (les lèvres) et j'ai donc encore retouché. La difficulté était de rendre la lèvre supérieure plus large, donc de l'éclaircir. Certains pigments (brun) sont venus avec le pinceau synthétique. Pour d'autres (rouge) il a fallu tricher un peu et frotter au mouchoir en papier, mais ce n'est pas encore conforme à ce que je voulais. Désolé.

Et si vous voulez comparer (je suis sûr que Nabil et Dominique apprécieront), voici la photo à l'origine du tableau.



J'ai reçu quelques messages pour échanger sur les aquarelles et ce blog. C'est toujours très sympa, merci. Peut-être les autres lecteurs seraient intéressés à vous lire et même à échanger avec vous. Alors n'hésitez plus. Osez, osez poster vos commentaires directement dans ce blog !

Nuages, brumes et brouillards

Mes tentatives de saisir brumes et nuages jouant à cache-cache avec les montagnes se sont le plus souvent révélées décevantes. La plupart des effets changent très vite.
Parfois la chance sourit. Ainsi, dans les tous derniers jours d'août 2009, j'avais eu la chance d'observer suffisamment longtemps les brumes lointaines - le soleil à cette époque semble ne plus chauffer plus assez fort pour les balayer rapidement - et d'en faire l'aquarelle qui a porté mes voeux pour cette année 2011.

En matière de brumes et nuages nous avons été particulièrement servis pendant la semaine que nous avons récemment passée aux Chavannes entre Noël et Jour de l'An. Pendant plusieurs jours, le plafond nuageux était très bas à Onnion. Le brouillard fût parfois si dense que nous distinguions à peine le clocher de l'église. 

Lorsque la température est très basse, les nuages rasent le fond de la vallée. Puis, au fur et à mesure que l'air se réchauffe, les nuages montent et gonflent, parfois à une vitesse incroyable. Au-dessus des nuages le soleil peut chauffer l'air, tandis que sous le nuage la température peut continuer à baisser. On a alors un phénomène d'inversion du gradient de température. Cela s'est produit plusieurs jours de suite pendant cette dernière semaine de 2010, provoquant dans les paysages des jeux d'ombres et de lumière très rapides. Le temps de saisir l'appareil photo, le paysage était bouleversé : des chaînes de montagne entières pouvaient ainsi apparaître ou disparaître en quelques secondes. Ce fût magique.

Un matin, j'ai essayé de saisir ce que je voyais de la chaîne des Aravis lorsque la mer de nuages montait. La lumière semblait venir de sous cette mer, et changeait rapidement. Trois coups de crayons, vite une ou deux photos, et puis plus rien : la lumière s'était éteinte, le nuage était monté. J'ai retranscrit l'essentiel de mémoire, mais la mienne est mauvaise, et me trompe. J'ai ainsi mutilé la Pointe Percée parce que je ne "croyais" pas le coup de crayon. Et pour terminer l'aquarelle je me suis aidé en regardant l'enregistrement photo (avec l'appareil qui s'éteint automatiquement au bout de 10 secondes !).
Je ressens maintenant une certaine émotion en regardant cette pauvre aquarelle, certainement due à l'effort de mémoire qu'il m'a fallu fournir, et à cette espèce d'exaltation qui m'avait pris pour saisir au plus vite ce que je ressentais alors et que je savais si évanescent.








Nous avons retrouvé la magie lorsque, ayant traversé le nuage en montant, nous nous retrouvions sous le soleil à Plaine-Joux. Nous avons admiré la mer de nuages qui s'étendait loin dans la vallée, jusqu'au delà de Cluses. De loin en loin quelques cîmes émergeaient, comme un chapelet d'îles.





La pointe de Miribel, vue par Christine cette fois

Christine est randonneuse et créatrice. Elle publie un blog très sympathique consacré au scrapbooking dont je vous recommande chaudement la visite.

Je ne le savais pas lorsque je l'emmenai peindre la Pointe de Miribel, au cours d'une balade-aquarelle en août 2009. Nous eûmes quelques difficultés à trouver un emplacement qui offre une belle vue tout en étant abrité du soleil. Nous le trouvâmes en haut d'un pâturage bien pentu, en lisière de forêt, entre barbelés et chemin boueux tracé par les vaches.
C'était je crois une des premières aquarelles que peignait Christine, mais elle se débrouillait superbement. J'en profitai pour peindre moi aussi, une fois encore la Pointe de Miribel

Christine a très gentiment accepté que je publie ses aquarelles dans ce blog. Je trouve beaucoup de caractère à celle-ci. Elle m'étonne par l'économie de moyens utilisés pour rendre une structure somme toute complexe de manière simple et réaliste en respectant bien le sujet et l'atmosphère qui s'en dégage. Cette montagne est  fièrement posée et attire l'oeil au premier regard. Puis celui-ci "lit" le paysage et s'arrête sur un autre point important de la composition, en bas à droite, où l'on imagine bien ce petit vallon légèrement boisé qui débouche sur un champ verdoyant. Celui-ci est manifestement plat, rompant avec les structures courbes des petits monts environnant. Les épicéas encadrent très simplement la scène et donne une profondeur à la scène.
Tout est calme, sage, serein.
Cette aquarelle me donne envie d'y retourner encore.


Paysage d'hiver : récidive

Bien sûr il faut être un peu fou pour grimper en haletant, raquettes aux pieds et aller se poser les fesses dans la neige, regarder le paysage et jeter quelques impressions sur le papier.
Encore plus fou de récidiver puisque j'avais déjà fait une tentative l'an dernier.

Cette fois je me suis posté au-dessus de la Tornerie à Plaine-Joux. La montée fut rude. La neige n'était plus très épaisse, en tout cas moins épaisse que dans mon jardin à Taverny, j'ai pu me poser sur un coin de rocher qui sortait de la neige. Le mot "coin" est bien approprié, et sa forme m'incita à ne pas user trop longtemps de son inhospitalité.

Quelles leçons en tirè-je ?
1. J'étais trop pressé, je n'ai pas pris assez le temps de respirer le sujet, de l'observer, m'en imprégner. Je croyais le connaître, quelle erreur !
2. Pour prendre le temps de se laisser apprivoiser par le paysage, il faut un minimum de confort : j'aurais dû emmener mon petit siège pliant !
3. J'admire davantage quelques tableaux de Brueguel l'ancien !

Pour faire plaisir à Nabil, je publie une photo de l'endroit, à peu près.




La Dombes, ou la difficile simplicité

Je trouve très beaux certains paysages très simples, j'ai du mal toutefois à dire pourquoi je les trouve beaux. Certainement leur simplicité y contribue-t-elle. Mais j'éprouve les plus grandes difficultés à en rendre compte par la photographie ou par l'aquarelle.

Par exemple cette aquarelle. La région des Dombes, dans l'Ain, est assez plate. Environ un millier d'étangs la parsème. Le ciel, l'eau, des arbres et roseaux y font tout le paysage, agrémenté de-ci de-là de fermes ou de villages. Bien sûr, j'aurais pu choisir une composition classique, avec une maison et des arbres qui se reflètent dans l'eau, un arbre au premier plan. J'ai préféré l'apparente banalité d'une scène qui me fascine.




Après les habituelles difficultés pour approcher le sujet, car les terrains sont privés et protégés comme des trésors, clos de barbelés de telle sorte qu'on ne peut même pas s'installer en bordure de route, j'ai tenté sans y arriver de m'abstraire des "sujets" que sont l'eau, les arbres et roseaux. Intellectuellement je "sais" que seules importent les relations de valeurs et de couleurs entre ces masses qui forment la composition. Mais mon pinceau ne s'y résigne pas, pas encore, il éprouve encore le besoin de se conformer à la représentation des choses. Il trouve l'excuse qu'on est là pour se faire plaisir, et pas pour se prendre la tête, mais je ne désespère pas lui faire entendre raison et plaisir simultanément.

Au pont Piccot j'étais furieux

Je vous ai déjà présenté le pont Piccot, que j'ai souvent pris pour modèle (voir aussi la diversité des regards).

En voici une autre illustration. L'aquarelle ici n'a pas grand intérêt en soi, mais son histoire me semble exemplaire.




Ce matin de juillet, je viens de passer une heure assez difficile. J'ai la mâchoire un peu serrée et j'ai besoin de me détendre. Alors je file vers le pont Piccot, en emmenant une aquarelle assez grand format que j'avais laissée en plan l'année précédente, avec l'intention de me repositionner sur le même gros rocher en aval du pont où je l'avais commencée, pour enfin la terminer.

Mais des travaux m'empêchent de poser la voiture à Amoulin, comme je faisais habituellement. Bon, 300 m de marche à pieds supplémentaires, ce n'est pas si grave, mais ça m'embête car le temps passe vite, la matinée est déjà bien avancée.

Nouvel obstacle sur le chemin qui descend au pont : un tracteur occupe toute la largeur du chemin, il creuse une tranchée pour passer une conduite d'eau. Quand ça va mal, ça va mal, mais bon, je n'ai pas fait tout ce chemin pour rien, je contourne l'obstacle, et me retrouve derrière le tracteur sur ce qui était autrefois un chemin, qui n'est plus qu'un bourbier défoncé. Au milieu une profonde saignée, et de part et d'autre deux levées de terre boueuse ! Mon bloc aquarelle en main (un grand format, ça ne rentre pas dans le sac à dos !), je progresse en équilibre, je glisse, je saute, je passe comme je peux. Mes mâchoires se serrent davantage, mais le pont n'est plus très loin. Je l'atteins enfin, et cherche le petit passage qui me permet habituellement de descendre sur la rive pour atteindre ensuite "mon" rocher.  

Là, stupeur : un couple a osé se l'approprier ! Vous rendez-vous compte ? Des inconnus sur "mon" rocher ! Pire encore : je ne peux même pas choisir un point de vue légèrement décalé qui me permettrait quand même de terminer le dessin, car leur tenue m'interdit de m'installer à portée de regard. Impossible de continuer l'aquarelle que j'ai amenée si difficilement jusqu'ici !

Je suis un peu sonné. En colère. Je ne peux pas avoir fait "tout ça" pour rien. Alors je descends un peu comme un automate de l'autre côté du pont, vers l'amont, loin et hors de vue du gros rocher. Je m'installe tant bien que mal (plutôt mal en fait) sur un petit groupe de pierres au milieu du Risse. Je sors du sac juste un petit bloc aquarelle, un pinceau et une boîte de peinture. Pas besoin de gobelet, l'eau est à portée de main ! Et même de pieds, ils sont à moitié dans l'eau eux aussi. Le soleil est déjà haut, je suis un paquet de nerf, mais je regarde encore ce paysage, je veux absolument rentrer avec une aquarelle terminée ce matin.

Les deux côtés (amont et aval) du pont sont très différents. La lumière inonde l'aval, et perce difficilement le feuillage à l'amont. L'aval est chaud (les amoureux en profitent), mais de ce côté il fait froid, surtout les fesses posées au ras de l'eau bouillonnante. L'inconfort pourtant n'est pas total : il y a l'eau courante ... et cette lumière qui fuse derrière les branches, qui fascine.

Alors le miracle se produit.

Non, le miracle ce n'est pas ce petit dessin que je vous montre. En fait, je n'ai pas réussi à restituer la lumière qui passe dans ces arbres sombres à droite. Mais peu importe après tout. Le miracle de l'aquarelle c'est que je me suis retrouvé là à ne plus penser qu'aux couleurs, aux lumières.  Je laisse le pinceau courir tout seul, jeter la couleur sur le papier sans réfléchir. C'est une espèce d'ivresse dans laquelle il n'y a plus ni douleur ni colère. Il n'y a que ce clair-obscur au fond du pont,  ce fouillis végétal à droite qui semble à la fois si sombre et illuminé, cette eau empierrée et ces pierres mouillées, ces structures enchevêtrées presqu'irreprésentables !

Et d'un coup, je prends conscience que la feuille est colorée, alors les rochers sont plus durs et font mal aux fesses, les pieds sont mouillés. Il fait froid. Il faut remonter. Mais tout est changé. Le tracteur a comblé une partie de la tranchée, le chemin est moins boueux, chauffé par le soleil. Je ne serre plus les dents, tout va bien. 

Je retournerai faire de l'aquarelle au Pont Piccot.

Portrait : Perrine joue à l'eau

Dans l'idée de tenter de comprendre un peu mieux comment "fonctionne" un portrait, je suis parti d'une photo que j'avais prise cet été. Ou plutôt d'une petite série de photos.

Pour moi, l'approche est assez radicalement différente de ce que l'on fait sur le vif. Comme la petite Perrine m'est très proche et très chère, je tenais à ce que le visage et la posture soient assez ressemblant non seulement à ce que l'on voit sur les photos, mais aussi à ce que je connais d'elle. Il m'a fallu presque 2 heures de dessin préliminaire et l'utilisation intensive de la gomme ! Je comprends pourquoi certains peintres utilisent un projecteur.

Le résultat doit beaucoup aux conseils que l'on m'a dispensés à l'AMAP (atelier d'Art Plastique de Taverny). Merci Loïc.

Perrine joue à l'eau
(le 13-12-2010 après quelques retouches)

Le fait d'avoir une photo devant moi m'a incité à respecter (à tenter de respecter, devrais-je écrire) un certain nombre de "détails" dont j'aurais certainement fait abstraction s'il s'était s'agit d'une scène sur le vif. Mais pourquoi pas ?  Je pense même que j'aurais pu jouer davantage avec le pinceau très fin pour la chevelure par exemple. Il faut dire que j'ai failli tout perdre avec cette chevelure, en me laissant encore une fois berner par les couleurs sombres.

Pour commencer j'avais eu un problème (classique) avec le fond : mouillé, il paraissait vraiment très sombre. En séchant il s'est considérablement éclairci. Une deuxième et même une troisième couche lui ont retiré de son naturel. Dommage.

J'en avais tiré la leçon qu'il fallait exagérer les valeurs sombres, puisqu'elles s'éclaircissent en séchant. Certes, mais j'avais certainement un peu forcé dans certaines zones de la coiffure, et il a fallu que je rattrape au "kleenex" avant que ça ne sèche complètement. Décidément, il faut connaître assez intimement le comportement de chacune des couleurs. J'ai encore bien à apprendre ... et j'en suis ravi.


Nabil m'a demandé de montrer des photos des sujets présentés ici. J'accède à sa demande.

Premiers portraits

Au club de dessin que nous avions monté au bureau il y a déjà pas mal d'années, j'avais exécuté deux ou trois portraits au fusain, et un à l'huile. J'avais aimé, et donc essayé le portrait d'une de nos filles à l'aquarelle : flop. La difficulté était trop grande. Je trouve d'ailleurs que même pour la photo, le portrait est vraiment très difficile. Et je n'ai donc plus tenté de portrait à l'aquarelle...

... jusqu'à ces dernières semaines, à l'Atelier Municipal d'Arts Plastiques de Taverny. Avec l'aide d'un bon prof, ça change beaucoup ! Voici le résultat d'une pause de 20 mn. 




Cela m'a encouragé à persévérer.
Mais je suis tombé sur d'autres difficultés, que je montrerai ultérieurement ...

La porte close au Rogin

Le temps était très couvert. J'accompagnais six ou sept volontaires - quasi débutants - pour une balade aquarelle. J'avais choisi d'aller au hameau du Rogin, au-dessus d'Onnion, où nous pourrions nous abriter si la pluie arrivait.
Chacun choisissant à la fois un sujet et un endroit assez confortable pour se poser, le groupe s'est dispersé. Je passais de l'un à l'autre, montant et redescendant les pentes, pour proposer aux uns et aux autres encouragements et explications : du sport !

Parmi les oeuvres réalisées lors de cette balade, en voici une que j'aime beaucoup.  Elle a du caractère, elle est spontanée. C'est je crois la première aquarelle de Claire. Elle est très différente de ce que je fais moi-même. J'apprends beaucoup lorsque je vois quelqu'un - débutant ou aguerri - s'exprimer de manière si personnelle.

Curieusement, cette porte close m'évoque un grand sentiment de liberté.



De nouveau les Fangles

J'ai voulu peindre à nouveau les Fangles fin août 2008. J'avais choisi un point de vue légèrement différent pour tenter de mieux équilibrer la composition. Montrer comment les chalets s'insèrent dans le virage du chemin. Je souhaitais aussi donner plus d'importance à l'arrière-plan : le temps était nuageux, brumeux, changeant, à gauche la base du massif du Mont-Blanc n'apparaissait que par lambeaux, sporadiquement, tandis que face à moi, dominant la scène, la Pointe Percée émergeait de la brume : on n'apercevait que la silhouette de la chaîne des Aravis, mais sa présence s'imposait.

Comme la fois précédente, il a fallu que je déménage en cours de travail, et que je l'interrompe.

Je ne l'ai poursuivi qu'en 2009. Une bonne occasion d'observer combien le paysage est à la fois constant et changeant. Depuis, je regarde les cathédrales de Rouen de Monet d'un autre oeil, et avec encore plus d'admiration et d'interrogations.


Les Fangles

Le chemin qui descend d'Ajon à Mégevette avec de nombreux méandres offre une grande variété de sujets. On pourrait sans se lasser, y venir peindre et se balader tous les jours.
Au bord du plateau de Plaine-Joux, à l'endroit où la pente se fait brusquement plus raide, les Fangles est un lieu particulier. Le ruisseau des Fangles y prend ses sources, qui dévalera jusqu'au Risse à Mègevette, si violemment parfois qu'il a fallu par endroits le contenir par du béton. Plusieurs chalets dispersés se sont installés aux Fangles. L'un au moins, celui qui est représenté ci-après, est occupé tout l'été. Je trouve l'endroit magique.
Mais pour l'aquarelliste le terrain est assez rude. Il est finalement difficile d'y trouver un emplacement qui offre à la fois un bon point de vue et un "confort" minimum. Le confort pour le peintre, c'est de pouvoir s'asseoir de manière stable et poser ses pinceaux et peintures sans que fourmis, guêpes ou vaches ne vous disputent le lieu. C'est être tranquille : être assis au milieu du chemin ne convient pas, les quelques 4x4 qui y passent n'apprécient pas. C'est si possible rester à l'ombre malgré la trajectoire du soleil.
J'ai peint ce chalet des Fangles en deux ou trois séances, mais j'ai du changer d'emplacement en cours de travail pour m'adapter aux circonstances : l'agriculteur voulait débroussailler exactement ici ce jour-là, puis les vaches ont tenu à s'abriter sous "mon" arbre ...  Je voulais respecter la "vérité" du paysage, mais la perspective a certainement été un peu bousculée et la composition s'en ressent.
Malgré ces déménagements et l'arrivée des nuages, c'est un agréable sentiment de sérénité que je ressentais dans ce lieu et que je voulais partager avec mon papier et tous ceux qui le regarderont.



Aquarelle en hiver : vif !

Le Môle émerge entre le Rocher Blanc et la Pointe des Brasses.

En mars dernier, raquettes aux pieds, j'ai tenté le paysage "sur le vif". Le froid aussi était vif, il n'y a que moi qui, à la fin de la séance, ne l'était plus beaucoup, vif.





Renouvellerai-je l'expérience ?

J'ai cherché sur internet quelques conseils à ce sujet. J'y ai trouvé que ce n'est pas facile, que l'eau gèle vite, que le papier ne sèche pas ... Merci je savais déjà !
Et qu'il vaut mieux mémoriser le paysage puis le peindre tranquilement bien au chaud.

Je ne sais pas si je suivrais ce sage conseil. La peinture "sur le vif" m'apporte en effet bien des avantages : j'ai l'impression que mon regard s'affûte par nécessité et que mon niveau de conscience augmente. Parfois, une certaine spontanéité s'impose d'elle-même : bienvenue ! 

La diversité des regards

Le Pont Piccot a souvent posé pour moi. Chaque fois est différente. Chaque fois s'impose un aspect particulier : une lumière, un sentiment, des couleurs, une envie de tenter une autre technique. Et puis, il faut bien l'avouer, l'eau joue sa partition personnelle imprévue  que l'aquarelliste maîtrise peu, et impose sa vision des choses, souvent avec bonheur.





La richesse de la diversité des regards est bien plus évidente encore lorsque plusieurs peintres attaquent le même sujet. J'aimerais vous montrer par exemple comment ce Pont Piccot a été vu par plusieurs personnes qui ont participé à la même balade-aquarelle.

Je souhaite en effet que ce blog ne reste pas un simple catalogue commenté de mes propres dessins mais qu'il s'élargisse à une pluralité de regards, de tentatives ... et de réussites !

Dans un premier temps, il pourrait accueillir les oeuvres des artistes novices ou confirmés qui, à Onnion ou ailleurs, m'ont suivi dans des balades-aquarelles.

Si vous en êtes, pouvez-vous s'il vous plaît m'autoriser à publier vos oeuvres ? Nous pourrions ainsi peut-être poursuivre une petite aventure commencée ensemble. Bien sûr je ne ferai rien sans votre autorisation.

Le Pont Piccot

Le Pont de Piccot permet au chemin qui va d'Amoulin (Commune d'Onnion) à Somety et Saint-Denis (Commune de Mieussy) d'enjamber le Risse. Le chemin n'est praticable qu'à pieds, à VTT, à cheval ou en tracteur. Aux abords du Pont Piccot, on peut accéder facilement au Risse.
Le Pont est étonnamment important et bien appareillé pour un si petit chemin. En fait, un examen un peu attentif des abords révèlent les vestiges de plusieurs constructions, sur chaque rive, en amont et en aval du Pont. Les restes de meules ne laissent aucun doute sur leur utilisation : il y avait là des moulins, l'endroit avait autrefois une portée économique certaine.

C'est un lieu sympathique pour pratiquer l'aquarelle tranquilement, et j'y suis venu assez souvent. J'en vois chaque année l'évolution : le Pont bouge, hélas ; les rochers du Risse, même parfois parmi les plus gros, se déplacent ; des arbres poussent, d'autres tombent. La vie, quoi.
L'aquarelle permet de sentir tous ces changements, qu'on appréhende si peu autrement.

Sur le vif, c'est à chaque fois une course de vitesse qui est menée contre les changements de lumière. Ce sujet m'a permis de me "jeter à l'eau". Aquarellement parlant.

Je vous livre aujourd'hui simplement la première aquarelle que j'y ai faite. D'autres suivront, mais celle-ci garde pour moi un esprit que je n'ai jamais su retrouver.




Au dessus des Gorges de Sales

C'est la seconde aquarelle de cette année que j'ai faite à partir d'une photo. Voici un peu de son histoire-géographie.

Les chalets de Sales sont une des belles randos classiques et faciles à partir de Sixt-Fer-à-Cheval (Haute-Savoie). Au sud de Sixt, la route passe à Salvagny, avec ses magnifiques chalets anciens, passe devant la cascade du Rouget, et s'arrête finalement au Lignon. Là, on ne peut continuer qu'à pieds. D'abord vers les deux magnifiques cascades : la Pleureuse, au débit constant qui arrive par résurgence de Tête Pelouse, et la Sauffaz qui descend des gorges de Sales. Un peu plus loin, le chemin se dédouble d'une part vers l'extraordinaire montagne d'Anterne, d'autre part vers les Chalets de Sales et, de là, vers la Pointe de Sales, les crêtes des Fiz, le Dérochoir, les Laouchets de Platé, la Pointe de Platé ...

Cette année, pas question hélas d'aller bien loin. Nous étions, ma femme et moi, accompagné de notre ami Michel. Avec lui, il y a toujours mille choses à apprendre, à découvrir, à apprécier. Comme je suis très lent, nous sommes arrivés en haut des gorges de Sales alors que le soleil était déjà bien haut.
Tout le massif - le Grand Massif - est calcaire. L'érosion laissent apparaître des structures stratifiées très fortes, inclinées de mille façons, et découpe la roche en lappiaz (prononcez : lappes). En haut des gorges, avant d'arriver sur le plateau où logent le refuge et les chalets de Sales, se trouvent des falaises aux strates très structurées. Le soleil, presqu'à la verticale, provoquait d'extraordinaires contrastes. Le calcaire presque blanc nous éblouissait, faisant apparaître les failles plus sombres et monumentales. Le contre-jour dévoilait le squelette auréolé de lumière de quelques mélèzes. Assez inhabituels dans la région, on trouve ces conifères à épines caduques plutôt de l'autre côté des Fiz, vers Passy et la vallée de Chamonix. Au pied des mélèzes et à tous les étages de la falaise, un troupeau de bouquetins dédaignait les randonneurs.

Là encore, le sujet est si sensible à la position du soleil que je n'ai pas imaginé sortir mes pinceaux,  je me suis contenté de l'appareil photo.


Syndrome sécuritaire

Il est très rare que je peigne d'après photo. Le plaisir de l'aquarelle, pour moi, c'est d'abord la découverte et l'observation - la contemplation parfois - d'une situation, d'une ambiance, dont  on cherche à extraire un "sujet".
Par contre généralement je prends aussi des photos : je m'en sers parfois pour quelques retouches, et souvent pour comprendre après coup ce qui n'a pas fonctionné dans l'aquarelle.

Mais le travail " sur le vif " n'est pas un tabou. Cet été j'ai commis deux aquarelles à partir de photos. La première est présentée ici. J'avais " découvert " ce sujet au cours d'une promenade dans le village d'Onnion. Ma femme et moi sommes passés devant cette chaîne rouillée à l'heure exacte où le soleil commençait à raser la porte. J'ai déclenché sans penser que je pourrais en faire un modèle.

Mais le mois d'août fût pluvieux. Quelques balades-aquarelle se sont déroulées ... à l'atelier, tandis que la pluie battait les vitres et les toits. Nous étions alors contents de chercher nos sujets dans les livres et magazines artistiques, et dans quelques photos tirées de l'ordinateur.

Tandis que Michel et Claude se sont essayés avec bonheur sur des Turner (des reproductions, rassurez-vous !)  je tentais la chaîne et son cadenas.


Sans la photo, j'aurais eu du mal à reconstituer géométriquement la forme de l'ombre sur la chaîne. C'est cela qui avait attiré mon attention de photographe, c'est encore cela qui m'a interrogé en peignant.
La texture et la couleur du bois étaient un défi. Je voulais que l'on comprenne bien que ce bois est brut, il y a des coups de scies qui viennent casser la structure verticale des fibres.
Du coup, j'ai trop négligé les anneaux de la chaîne. La pire erreur de cette aquarelle, je crois, est l'utilisation malencontreuse du noir pour marquer des ombres sur les chaînons du bas. Je me suis fait surprendre : je n'avais pas nettoyé mon pinceau, mais au mouillé la valeur et la couleur semblaient satisfaisantes. Or, si souvent les couleurs s'éclaircissent en séchant, ici ce fût tout le contraire. Ça m'apprendra !

Les couleurs ne sont pas bien restituées sur l'ordinateur, il faudra décidément que j'apprenne à étalonner mes appareils. Quelqu'un saurait-il m'expliquer pourquoi certaines couleurs - en particulier le bleu de Prusse - prennent une telle importance quand on les photographie ?

Je ne peux pas ne pas parler du sujet lui-même. La chaîne est assez irrégulière : elle a visiblement été forgée à la main ! Elle " ferme " la porte. Regardez à quel point son rôle est symbolique : la chaîne n'est tenue que d'un côté, le cadenas n'est fermé que sur lui-même. Serait-il posé pour réellement enchaîner que l'on verrait sans peine qu'on pourrait l'ouvrir sans trop de difficultés. En fait cette chaîne dit simplement : "s'il vous plaît, n'entrez pas ici, c'est chez moi". Et peut-être cela est-il aussi efficace que des caméras de télé-surveillance.


"ça ne se fait pas comme ça"

J'ai peint cette aquarelle il y a quelques années, très laborieusement. Je débutais en quelque sorte, et j'avais osé m'affronter aux arbres et rochers en me plaçant dans un lacet du chemin qui descend d'Ajon à Mégevette, au dessus des chalets des Fangles. Je vous parlerai ultérieurement des chalets des Fangles et vous en montrerai quelques aquarelles plus récentes.
En attendant, celle-ci a une histoire.
Je l'ai montré - à sa demande - à un prof d'arts plastiques qui venait nous conseiller dans un club que nous avions créé au boulot. Sa réaction fût : "les rochers, ça ne se fait pas comme ça, ils ne sont pas comme ça". Malgré l'estime que je portais au prof, et bien qu'il n'ait pas eu tort dans l'absolu, je lui dis alors mon profond désaccord, celui-ci n'ayant depuis fait que croître avec l'expérience.



En premier lieu, il y a dans le "ça ne se fait pas comme ça" l'idée que les choses devraient être représentées d'une certaine façon et pas d'une autre. Faudrait-il donc forcément céder aux conventions ? Certes tout au long des siècles d'innombrables artistes, dont beaucoup que je considère comme des génies, ont élaboré des manières de faire qui sont infiniment meilleures. Mais je garde ma liberté et mon plaisir - et vous engage à défendre les vôtres - d'essayer comme bon nous plaît. Nous avons droit à l'erreur.

En second, quiconque n'est pas présent sur place ne peut a priori contester ce qu'exprime celui qui y est. J'ai trouvé souvent la même attitude dans les situations professionnelles - je sais mieux que toi parce que je suis le patron - ou des situations universitaires - je sais mieux que toi parce que je suis le prof - ou des situations politiques - je sais mieux que toi parce que suis élu. Je réfute de plus en plus cet élitisme un brin arrogant, et je me surveille pour éviter si possible d'y succomber moi-même.
Je crois au contraire que chacun quel qu'il soit, débutant maladroit, étudiant ignorant, simple citoyen, en recherchant et créant son autonomie de création, en vivant des situations spécifiques, en se comportant autrement qu'en consommateur de prêt-à-penser, peut apporter son écot à la maison de la culture et de la connaissance commune.
 

Encore la pointe de Miribel

Certains jours la pointe de Miribel est plus sage, plus calme, presqu'assoupie. Elle se laisse alors tirer le portrait plus facilement.
Mais peut-être ces jours-là est-ce le peintre qui est plus calme, plus attentif, plus disponible aussi ?


A la différence de l'aquarelle précédente, qui avait été jetée brutalement sur le papier, celle-ci a été plus réfléchie pour tenter de rendre le modelé du paysage dans une composition plus construite.
Dès qu'elle fût terminée je savais que je la donnerais à une amie que j'estime beaucoup, une artiste vraie. Je suis fier que cette aquarelle figure dans sa collection.

La pointe de Miribel

Quelque soit l'endroit où l'on se promène sur le plateau de Plaine-Joux, on aperçoit la Pointe de Miribel. C'est une pointe sympathique : elle s'offre facilement à l'ascension.

De son sommet couronné d'un chemin de croix de marbre grossier, à 1581 m d'altitude, on découvre un formidable panorama sur 360 degrés, et particulièrement d'un côté la Vallée Verte et le Lac Léman, de l'autre les sommets du Chablais et, plus loin, le Mont Blanc. Et puis les Aravis, le Bargy, le Môle, la pointe des Brasses... Ceci dit pour vous inciter à y grimper. Mais avant cela, revenons à son esquisse.

Si la pointe s'offre à l'ascension elle s'offre aussi, forcément, à son portrait. Je l'ai donc proposée plusieurs fois à ceux qui m'accompagnaient dans les balades-aquarelles.
La pointe de Miribel est une belle dame : une fois ton regard et ton attention attirés vers elle tu l'observes et tu en ressens un mystère indéfinissable qui te pousse à la regarder et la découvrir davantage. Pinceau à la main, tu t'aperçois que tu étais passé mille fois devant elle mais que tu ne l'avais jamais véritablement regardé. Chaque coup de pinceau t'interroge, chaque regard t'apprend quelque chose de nouveau, qui donnera lieu à de nouvelles questions. Plus tu la connais et plus elle semble se dérober. Et quand tu crois avoir saisi l'un de ses traits, elle n'a pas son pareil pour se parer d'un nuage et se farder d'une imperceptible lumière pour te replonger dans l'interrogation.
Tu pourrais croire que ce modèle de calcaire immuable saura tenir la pose ? Eh bien non. Elle vit, respire, bouge, se présente à chaque instant d'une nouvelle manière.

Au début Août de cette année, j'ai voulu prendre de vitesse ses changements de caractère : en 10 mn j'ai laissé mon pinceau marquer rapidement quelques traits que mes yeux maintenant connaissaient d'elle à force de la regarder et de la représenter ou qu'ils découvraient  encore.


C'est un peu aussi cela que j'aime dans l'aquarelle en liberté : ce n'est pas forcément créer "une oeuvre", mais simplement apprivoiser le paysage. Ou plutôt c'est ce qu'il te laisse croire, car c'est toujours lui qui reste le maître.

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