Syndrome sécuritaire

Il est très rare que je peigne d'après photo. Le plaisir de l'aquarelle, pour moi, c'est d'abord la découverte et l'observation - la contemplation parfois - d'une situation, d'une ambiance, dont  on cherche à extraire un "sujet".
Par contre généralement je prends aussi des photos : je m'en sers parfois pour quelques retouches, et souvent pour comprendre après coup ce qui n'a pas fonctionné dans l'aquarelle.

Mais le travail " sur le vif " n'est pas un tabou. Cet été j'ai commis deux aquarelles à partir de photos. La première est présentée ici. J'avais " découvert " ce sujet au cours d'une promenade dans le village d'Onnion. Ma femme et moi sommes passés devant cette chaîne rouillée à l'heure exacte où le soleil commençait à raser la porte. J'ai déclenché sans penser que je pourrais en faire un modèle.

Mais le mois d'août fût pluvieux. Quelques balades-aquarelle se sont déroulées ... à l'atelier, tandis que la pluie battait les vitres et les toits. Nous étions alors contents de chercher nos sujets dans les livres et magazines artistiques, et dans quelques photos tirées de l'ordinateur.

Tandis que Michel et Claude se sont essayés avec bonheur sur des Turner (des reproductions, rassurez-vous !)  je tentais la chaîne et son cadenas.


Sans la photo, j'aurais eu du mal à reconstituer géométriquement la forme de l'ombre sur la chaîne. C'est cela qui avait attiré mon attention de photographe, c'est encore cela qui m'a interrogé en peignant.
La texture et la couleur du bois étaient un défi. Je voulais que l'on comprenne bien que ce bois est brut, il y a des coups de scies qui viennent casser la structure verticale des fibres.
Du coup, j'ai trop négligé les anneaux de la chaîne. La pire erreur de cette aquarelle, je crois, est l'utilisation malencontreuse du noir pour marquer des ombres sur les chaînons du bas. Je me suis fait surprendre : je n'avais pas nettoyé mon pinceau, mais au mouillé la valeur et la couleur semblaient satisfaisantes. Or, si souvent les couleurs s'éclaircissent en séchant, ici ce fût tout le contraire. Ça m'apprendra !

Les couleurs ne sont pas bien restituées sur l'ordinateur, il faudra décidément que j'apprenne à étalonner mes appareils. Quelqu'un saurait-il m'expliquer pourquoi certaines couleurs - en particulier le bleu de Prusse - prennent une telle importance quand on les photographie ?

Je ne peux pas ne pas parler du sujet lui-même. La chaîne est assez irrégulière : elle a visiblement été forgée à la main ! Elle " ferme " la porte. Regardez à quel point son rôle est symbolique : la chaîne n'est tenue que d'un côté, le cadenas n'est fermé que sur lui-même. Serait-il posé pour réellement enchaîner que l'on verrait sans peine qu'on pourrait l'ouvrir sans trop de difficultés. En fait cette chaîne dit simplement : "s'il vous plaît, n'entrez pas ici, c'est chez moi". Et peut-être cela est-il aussi efficace que des caméras de télé-surveillance.


2 commentaires:

  1. J'aime beaucoup cette aquarelle car on a l'impression de sentir la chaleur du soleil sur le bois.

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  2. " Il est très rare que je peigne d'après photo", dis-tu.
    J'en apprècie d'autant davantage "Les Arêtes de Rochefort et la Dent du Géant",aquarelle réalisée d'après photo ...
    Eddy

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